Les catégories grammaticales et l’interaction entre syntaxe et sémantique

Publié le 8 janvier 2018 Mis à jour le 21 juin 2018
le 7 juin 2018
14h-16h
Salle E412

Stéphane Robert, LLACAN Paris - Séminaire CLLE-ERSS

(1)   La transitivité en français à l'épreuve des potentiels évoqués (ERPs) 

Présentation d’une expérience d'imagerie cérébrale utilisant l'électrophysiologie pour éclairer le traitement de la transitivité en français et la question plus générale de l'interaction entre syntaxe et sémantique. Cette expérience montre que l’introduction d’un objet dans une structure SVO avec un verbe intransitif (incongruité syntaxique) est traitée différemment selon le degré de congruence sémantique entre l’objet et le verbe (e.g. L’ennemi a conspiré un complot vs. L’ennemi a déjeuné un complot). Après avoir présenté les détails de cette expérience, je proposerai une analyse linguistique, s’appuyant sur la Frame Semantics et les Grammaires de Construction, pour rendre compte de ces effets d’interaction entre syntaxe et sémantique observés dans les traitements par le cerveau.

Magne Cyrille, Besson Mireille & Robert Stéphane. 2014. Context influences the processing of verb transitivity in French sentences: more evidence for semantic-syntax interactions, Language and Cognition 6/2: 181-216.
 

(2)   Les marqueurs transcatégoriels: problèmes d’analyse et présentation du modèle de grammaire fractale

 L’existence de morphèmes utilisés en synchronie dans différentes catégories syntaxiques est bien attestée à travers les langues (e.g. fr. maintenant adverbe temporel ou connecteur argumentatif, angl. imagine verbe ou subordonnant). Dans certaines langues, ces morphèmes ‘transcatégoriels’ peuvent avoir une variété d’emploi qui représente un véritable défi pour l’analyse (e.g. wolof ginnaaw ‘dos’, ‘derrière’, ‘excepté’, ‘puisque’). Pour rendre compte de ce type de fonctionnement, caractérisé par une variation de portée syntaxique et sémantique au travers des différents emplois (fonctionnement “fractal”), je propose un modèle dynamique d’analyse de ces marqueurs, la “grammaire fractale”. Ce modèle se définit par deux mécanismes fondamentaux: la construction d’une forme schématique invariante, qui rend compte de l’unité du terme, et l’activation de propriétés d’échelles, qui rend compte de la variation sémantique et syntaxique. Illustrée par des exemples pris dans des langues diverses, la présentation de ce modèle sera aussi l’occasion d’une réflexion sur les apports et limites des différents modèles d’analyse de la grammaticalisation et de la polysémie, ainsi que sur le statut des catégories linguistiques.

Robert, Stéphane (ed.) 2003. Perspectives synchroniques sur la grammaticalisation: Polysémie, transcatégorialité et échelles syntaxiques. Collection Afrique et Langage n°5. Louvain: Editions Peeters.

Robert, Stéphane. in press. The challenge of polygrammaticalization for linguistic theory: fractal grammar and transcategorial functioning. Cognitive Linguistic Studies 5:1, special issue Transcategoriality. A crosslinguistic perspective, Hancil, Sylvie, Danh Thanh Do-Hurinville and Huy Linh Dao (eds.): 108-134.