Thèse Jérémy Béna

11 décembre à 09h00 en visioconférence

Titre
:
L’effet de vérité, attribution incorrecte de la familiarité à la vérité ou mise en correspondance avec les contenus récupérés en mémoire ? Étude des effets modérateurs de la division de l’attention et du délai, et généralisation de l’effet de vérité au conspirationnisme

Jury :
Aurélia BUGAISKA, Professeur, LEAD, Université de Bourgogne, Rapporteure
Frédéric VALLÉE-TOURANGEAU, Professeur, Systemic Cognition Lab, Kingston University, Rapporteur
Pascal WAGNER-EGGER, Lecteur, Université de Fribourg, Examinateur
Emmanuel BARBEAU, Directeur de recherche CNRS, CerCo, Université Toulouse III Paul Sabatier, Examinateur
Patrice TERRIER, Professeur, CLLE, Université Toulouse – Jean Jaurès, Directeur de thèse
Ophélie CARRERAS, Maître de Conférences, CLLE, Université Toulouse – Jean Jaurès, Directrice de thèse
 
Résumé :
La diffusion massive d’informations présente une face obscure : la prolifération rapide de fausses informations. Dans ce contexte, comprendre comment nous jugeons la vérité des informations que nous rencontrons s’avère crucial. L’exposition répétée aux informations augmente la tendance à les juger comme vraies. Cet effet de vérité est couramment expliqué par la familiarité, qui serait incorrectement attribuée à la vérité des informations en l’absence de recollection, soit le souvenir précis d’y avoir été exposé avant. Dans le présent travail, nous pointons des limites de cette hypothèse, et proposons une alternative à l’hypothèse de familiarité : l’hypothèse de correspondance duale. Cette dernière suppose que nous évaluons la vérité des informations à travers leur correspondance avec des contenus récupérés en mémoire, que la récupération de ces contenus peut être basée sur la familiarité comme sur la recollection, et ce en particulier lorsque nous ne pouvons pas récupérer des indices de vérité à travers le souvenir de la crédibilité de la source ou le souvenir d’un jugement de vérité formulé sur la même information auparavant. En divisant l’attention à l’encodage ou en augmentant le délai entre les phases expérimentales, dégrader la recollection devrait ainsi augmenter l’effet de vérité pour l’hypothèse de familiarité, mais le diminuer pour l’hypothèse de correspondance duale. À travers trois études préenregistrées (Ntotal = 455) et trois analyses d’études existantes, nous avons voulu estimer les mérites relatifs des deux hypothèses en manipulant l’attention à l’encodage et le délai dans des procédures à un (Études 1 à 3) et à deux jugements (Études 4 à 6) de vérité. Il apparaît (1) comme anticipé, que les deux hypothèses expliquent aussi bien certains résultats, car leurs prédictions sont similaires en présence d’indices de vérité, (2) que des résultats que nous pensions attendus sous les deux hypothèses n’ont pas été mis en évidence, possiblement du fait de problèmes méthodologiques, (3) que l’hypothèse de correspondance duale rend mieux compte de certains résultats que l’hypothèse de familiarité, mais l’inverse est aussi le cas. Dans un volet plus secondaire et appliqué de la thèse, nous avons montré que l’effet de vérité pourrait exister avec des théories du complot à travers des réanalyses corrélationnelles de deux enquêtes à grande échelle. Globalement, le travail réalisé suggère que l’hypothèse de correspondance duale est une alternative pertinente à l’hypothèse de familiarité, mais indique également que la confrontation des deux hypothèses est à poursuivre pour mieux comprendre les processus de mémoire impliqués dans l’effet de vérité. Cet effet pourrait en outre être impliqué dans des phénomènes sociétaux d’envergure tels que le conspirationnisme, invitant à davantage coupler son étude en laboratoire à des études dotées d’une plus grande validité externe. L’effet de vérité pourrait exister au-delà de la familiarité et des affirmations neutres typiquement utilisées pour mettre en évidence l’effet.